Retour

La vieille au chien noir

Blémont Emile

BTN Ajouter à une liste
Léon-Émile Petitdidier, dit Émile Blémont, né le 17 juillet 1839 à Paris où il est mort le 1 février 1927, est un poète et auteur dramatique français.La vieille au chien noirINous étions venus à vingt ans de Marseille à Paris, Jean, Marius et moi, tous les trois possédés de grands appétits, de grands espoirs et d’immenses résolutions. Nous voulions tout apprendre, jouir de tout et gouverner le monde, d’abord les femmes, ensuite les hommes.Pendant les premières années de notre puberté, nous avions vécu, dans les livres ou en imagination, une vie plus longue que celle du docteur Faust . et nous nous élancions vers la capitale des plaisirs et des études avec plus de désirs que le héros de Goethe. Car il était las de l’étude quand vint Méphistophélès . et nous, nous étions aussi avides de science que d’amour et de gloire. Nous voulions tout, ne connaissant rien encore.Nous nous installâmes ensemble dans un coin tranquille du quartier Saint-Germain. La différence de nos caractères nous sépara bientôt. Pourtant, nous étions toujours fraternellement unis . et nous demeurions à cinq minutes l’un de l’autre.Jean était poète. Marius s’adonnait aux sciences chimiques et chimériques, naturelles et surnaturelles. Pour moi, je m’étais voué éperdument aux mathématiques et à l’astronomie. Oui, à l’astronomie ! Ces choses me paraissaient si peu avancées, si enfantines encore, et avaient un horizon si vaste, qu’elles m’attiraient avec une sorte de vertige. Je travaillais ferme . j’étais très timide, surtout à l’égard des femmes, et je vivais comme un reclus, plongé dans la mysticité astrale. Mes deux amis travaillaient beaucoup moins et s’amusaient beaucoup plus. Je finis par les voir seulement de loin en loin. Je savais que Jean, par le charme de la voix, de l’oeil et de la poésie, avait fait la conquête d’une ravissante couturière, et que Marius jouissait d’une véritable célébrité dans les bals publics.IIUn dimanche que je flânais, pensant à Mars et à la Lune, j’aperçus devant moi, en levant les yeux par une échappée de rêverie, Marius, Jean et la jeune couturière, qui, dans un rayon de soleil, s’en allaient, légers, avec des éclats de rire, je ne sais où.Je marchais lentement, ils n’allaient pas vite non plus : ils suivaient d’assez près une vieille femme, vêtue d’étranges haillons, qui portait sur le doigt un perroquet de cent ans, et traînait au bout d’une ficelle un horrible petit chien noir.Je sus bientôt la cause de la grande hilarité de mes amis. Jean donnait le bras à sa Jeanne . et Marius, la canne à la main, voltigeait de l’autre côté de la jolie grisette, car, disons-le, c’était une vraie grisette.Il y a encore des grisettes . Béranger et Paul de Kock ne les ont pas emportées toutes dans leur tombeau.Or, voici ce qui provoquait la gaîté de Jeanne. Marius, adroit comm

Nombre de pages : 6

Date de publication :

Éditeur : Audiocité

Le studio Littérature

De la même thématique Littérature